Et vous, vous lisez quoi ? đź“š

J’aime pas les romans, j’arrive pas à être concentré et à minvestir dans l’histoire et les personnages, alors à la place je lis des livres de science, la plupart du temps.

C’est pas le dernier lu, mais voilà un chouette ouvrage d’Aurélien Barrau (Des univers multiples - A l’aube d’une nouvelle cosmologie) qui décrit les différentes formes d’univers multiples envisageables (en appuyant sur le côté très très spéculatif de certains modèles) :

Notre Univers ne serait-il qu’une fraction d’un vaste multivers ?
À l’heure des résultats expérimentaux de Planck et du LHC, de nouvelles questions essentielles se posent quant à l’unicité de l’Univers lui-même.
Se pourrait-il que notre cosmos ne soit qu’un îlot dérisoire perdu dans un vaste multivers ? Il est aujourd’hui légitime de le supposer. Mais cette proposition vertigineuse est-elle encore scientifique ?

J’ai aussi lu Se dire lesbienne: Vie de couple, sexualité, représentation de soi, de Natacha Chetcuti.

Un livre manifestement plus destinĂ© aux Ă©tudiant.e.s qu’au grand public, plein de jargon, et qui possède l’extraordinaire expression de « pratique pĂ©nĂ©trative technologisĂ©e Â» quelque part dans son texte.

Comment se définissent les lesbiennes ? Comment aiment-elles ? Quels sont leurs modèles de couple ? Quelle est leur sexualité ? Comment sont-elles perçues par les femmes hétérosexuelles ?

Ce livre, à la fois novateur, riche et subtil, est le premier, en France comme à l’étranger, à s’attacher à l’intimité des femmes lesbiennes en s’appuyant sur des récits de vie.

Il retrace l’histoire de cette « catégorie » apparue dans les années 1870, décrit les trois parcours menant à la construction de soi en tant que lesbienne, s’attarde sur le coming out et révèle notamment que le couple est une manière privilégiée de se déclarer et de se révéler socialement lesbienne (on préfère dire à sa famille qu’on vit avec une femme plutôt que de déclarer « Je suis lesbienne »).

Ce sont donc les modalités de la rencontre et les manières d’être en couple qui forment le cœur de ce livre, qui tire aussi son originalité de l’analyse des « scripts sexuels » (cf. J. Gagnon, Les scripts de la sexualité, Payot) des lesbiennes. Recevoir ou donner du plaisir, tenir compte du désir de l’autre, susciter, accepter ou imposer son propre désir… autant d’attitudes qui se déclinent différemment en contexte hétérosexuel ou lesbien.

Une norme reste commune à toutes les femmes, quelle que soit leur orientation sexuelle : la place donnée à l’autre.

Ă€ vous !

Je viens de lire ça :

Je l’ai acheté par curiosité (j’avais déjà entendu parler de Kluger à plusieurs reprises, notamment lors d’un podcast de Stefayako), et aussi un peu par nostalgie, parce que ça me manque de ne pas avoir des pages de posts sur le tatouage (en français) à lire :sweat_smile:

Bon, c’est peut-être un peu cher pour ce que c’est, et je n’ai pas appris quand chose de nouveau. Mais c’est un bouquin utile quand on ne connait rien ou pas grand chose au tatouage. Surtout quand on a envie de se faire tatouer pour la première fois.

J’ai quand même relevé deux informations qui pour moi sont fausses (ou alors, c’est vraiment très mal dit au point de porter autant à confusion) :

La méthode de handpoke est réputée beaucoup plus douloureuse que les techniques modernes

Heu… what ?

Toutes les peaux absorbent l’encre de la même façon

Alors, non, pas du tout !

Sans compter une référence (que je salue en passant) au compte Insta Balance ton tatoueur, tout en citant, à plusieurs reprises, des tatoueurs qui ont justement fait l’objet de publications sur ce compte…
Bref, je ne vais pas rentrer dans ce débat-là.

En tout cas, ce petit bouquin a le mérite d’exister.
Il y a un chapitre sur l’histoire du tatouage, et un autre sur les contre-indications et complications post-tatouage que j’ai particulièrement appréciés.
Quelques illustrations sympas aussi, même s’il y en a trop peu à mon goût (dans un livre sur le tatouage, on s’attend quand même à voir BEAUCOUP de photos).
Et une interview avec Freakyhoody pour finir :smile:

Sinon, en général, je lis des romans d’horreur/fantasy/thriller/policier, voire des BD plus récemment !

J’y connais rien en tatouage (:upside_down_face:) mais la phrase que t’as quotĂ©e « Toutes les peaux absorbent l’encre de la mĂŞme façon Â» me semble vraiment bizarre. Bizarre de faire une erreur aussi grossière non - si c’est bien une grossière erreur :smile: ?

Je serais intéressé pour lire juste l’interview de freakyhoody, y a moyen que tu prennes les pages en photo ? J’ai vu un certain nombre d’interviews de lui et j’ai pas été super enchanté par sa personnalité. Le rapport heavymods / éducation / enfants est plutôt intéressant et je le crois volontiers quand il dit que les frictions sont à 99.9% du temps dûes aux parents, mais il a tendance à beaucoup se la raconter de manière générale.

D’ailleurs je me demande s’il continue à enseigner de nos jours, à quelle fréquence. Les trucs les plus récents de lui que j’ai lu qui datent pas d’hier disaient qu’il faisait juste des remplacements.


J’avais commencé à lire Seuls dans l’Univers : De la diversité des mondes à l’unicité de la vie, de Jean-Pierre Bibring (astrophysicien à moustache ayant œuvré sur plusieurs programmes d’exploration spatiale).

L’ami JP est un défenseur de l’hypothèse de la terre rare, c’est à dire que la vie telle qu’on la connaît n’existe peut-être nulle part ailleurs dans l’univers. Le point de départ étant que la vie terrestre est le fruit d’un nombre de contingences successives (qui commence à la formation du système solaire pour finir à toute la chimie actuelle - atmosphère, géologie, etc) tel que la probabilité qu’ils se reproduisent ailleurs est infinitésimale.

S’ajoute le fait qu’aucune observations Ă  ce jour ne montre une planète qui ressemblerait Ă  la terre, et que l’idĂ©e que « y a tellement de planètes dans l’univers que la vie doit bien exister ailleurs Â» est purement dogmatique. Enfin bref, il en parle en long et en large.

Hélas j’ai pas lu le livre en entier, non pas par désintérêt, mais parce que ma capacité d’attention est trop faiblarde. C’est ça d’être un jeune[1] en 2024.

Mais j’ai regardé plusieurs de ses conférences sur le sujet, alors voilà.

Sinon je lis énormément de BDs, il faut donc que j’ajoute un message au sujet dédié :nerd_face:


  1. La jeunesse est une notion relative. ↩︎

Mais j’y pense, le dermatologue tatoué me disait quelque chose, on avait dû en parler sur bodywork.

https://www.aphp.fr/contenu/ouverture-de-la-1ere-consultation-tatouages-en-france-lhopital-bichat-claude-bernard

Ah oui, je ne m’en souviens pas mais c’est plus que probable qu’on en ait parlé sur Bodywork étant donné qu’il a ouvert le premier (et le seul à ma connaissance) service de consultation spécialement dédié aux tatouages.

Voici l’extrait en question, qui est à minima incomplet, et qui porte à confusion :


Alors prendre un livre en photo, c’est hyper galère en vrai :sweat_smile:
Donc désolée pour le cadrage, mes doigts qui apparaissent sur les photos, la lumière bien pourrie et le léger floutage par endroit…











Oui, il se la raconte pas mal je trouve… mais ça va avec son métier de performeur.
En tout cas, il enseigne encore mais plus en maternelle, en CM2. Et il ne fait plus de remplacements non plus, il reste dans la même classe toute l’année.
Il était invité dans un shop de ma ville l’allée dernière, à l’occasion d’un flash day pour octobre rose. J’ai franchement hésité à aller y faire un tour pour le rencontrer, et puis finalement, je ne l’ai pas fait. Le mode groupie, très peu pour moi. Mais je regrette un peu ! J’aurais au moins aimé vérifier s’il est si imbu de lui-même ou si c’est un genre qu’il se donne (j’opte plutôt pour cette seconde option).

Je ne connais pas, mais le sujet m’intéresse :slightly_smiling_face:
Je l’ajoute à ma PAL !

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Pour le « Les peaux absorbent l’encre de la mĂŞme façon Â» on pourrait le comprendre comme « le mĂ©canisme d’absorption est le mĂŞme pour toutes les peaux Â» :thinking:

Merci pour les pages ! Je retranscris :


INTERVIEW DE SYLVAIN HÉLAINE ALIAS FREAKYHOODY

Nous ne pouvions pas écrire un guide sur le tatouage sans donner la parole au célèbre FreakyHoody, connu – et surtout reconnu – pour ses impressionnants tatouages qui ne forment qu’une seule et même œuvre (voir cahier photos p. XIV-XV).

Pouvez-vous vous présenter ?

Je suis Sylvain Helaine, connu sous le pseudo FreakyHoody sur tous les réseaux sociaux, c’est-à-dire TikTok, YouTube, Instagram et même le minitel s’il existait encore ! Professeur des écoles depuis une quinzaine d’années maintenant, je suis celui qu’on appelle «l’homme le plus tatoué de France». Un jour, TF1 a réalisé un reportage en me nommant ainsi, puis M6 a suivi et ainsi de suite… Ce surnom m’est resté. Personnellement, je n’ai jamais prétendu revendiquer ce titre, même si, dans les faits, je suis sûrement un des hommes les plus tatoués au monde !

Tout a commencé quand j’avais 27 ans et demi. J’étais à Londres, dans le cadre du programme Jules Verne (un programme d’échanges des profs comme Erasmus pour les étudiants). À l’époque, j’étais à un tournant de ma vie, je cherchais quelque chose à faire. Ça aurait pu être collectionner les Lego, acheter des voitures de course, etc., mais il se trouve qu’à Londres, les gens sont beaucoup plus ouverts sur leur apparence. Les Anglais sont vraiment décomplexés par rapport à l’histoire du tatouage : à l’époque, la noblesse et la haute bourgeoisie britannique partaient visiter le monde et revenaient du Commonwealth avec de superbes pièces. Alors que pour nous, en France, c’étaient davantage les prisonniers envoyés à Cayenne qui revenaient avec des pièces dégoûtantes…

Pourquoi avoir attendu d’avoir 27 ans pour réaliser votre premier tatouage ?

Je suis né en 1985. Ma génération a grandi avec Les Chevaliers du Zodiaque et le dragon tatoué dans le dos de Ryûhô. On voyait les tatouages des catcheurs et des footballeurs à la TV… Comme tout le monde, j’ai toujours plus ou moins eu envie d’en avoir. Mais, ce qui me freinait, au-delà de l’aspect financier évidemment, c’était tout simplement l’opportunité et le déclic, que j’ai finalement eus à Londres.

Pourquoi avoir voulu tatouer tout votre corps ?

Dès le début, je savais que je voulais tatouer mon corps en entier. Je pensais faire un irezumi à la japonaise, c’est-à-dire un tatouage coupé à la hauteur du cou et des mains pour pouvoir rester discret en toutes circonstances. D’ailleurs, pendant trois ans, personne autour de moi, même ma famille, ne savait que j’étais tatoué… C’est seulement après avoir fini tout mon corps que j’ai eu un deuxième déclic. Je me suis dit «tant pis, pas grave, on continue !» J’ai commencé à faire le cou, les mains, le visage… et ma nouvelle vie a commencé. J’ai alors été repéré par des agences de mannequins et j’ai commencé le mannequinat. Mais à la base, je ne voulais pas tout faire… c’est juste que je n’avais plus de place sur le reste du corps ! J’ai toujours considéré que je n’avais qu’un seul et unique tatouage. D’ailleurs, en convention, quand quelqu’un me dit «j’ai huit tatouages», je réponds «tu en as huit fois plus que moi alors, parce que moi je n’en ai qu’un !»

Parmi toutes tes séances de tatouage, laquelle a été la plus marquante ?

Toutes les séances sont difficiles et contrairement à une idée reçue, plus tu te fais tatouer, plus c’est difficile parce que le corps a déjà vécu le traumatisme et s’en souvient… Au début de ma «carrière de tatoué», je faisais des séances de six voire sept heures. C’était dur, mais je les tenais. Maintenant, je fais des séances de deux voire trois heures maximum. Chaque mois, je prévois une vraie séance, et une séance de retouche de quinze à vingt minutes, et ça suffit. Je ne peux pas vraiment faire plus physiquement. Les séances les plus difficiles sont évidemment celles sur les parties génitales, les paupières, les plantes des pieds et les paumes des mains. Elles sont beaucoup plus difficiles à supporter que les autres. Même si une séance «classique» fait mal de la première à la dernière seconde ! D’ailleurs, j’ai remarqué une chose : plus on appréhende une séance, mieux elle se passe. Alors que plus on y va en dilettante et plus on souffre ! En effet, le fait d’appréhender rend la séance plus supportable. C’est un peu comme quand on dit «tu vas voir, tu vas souffrir le martyre…», tu t’en es fait toute une histoire et, au final, tu ne souffres pas tant que ça… En plus des tatouages, j’ai aussi réalisé des modifications corporelles : je me suis tatoué les yeux, la langue, les gencives… Là, je suis en train de me tatouer la peau sous les ongles par exemple. Je me suis aussi fait retirer les tétons, le nombril, ainsi que 22 grains de beauté. Les tatoueurs en général refusent toujours dans une optique de tatouage. Les tatoueurs en général refusent de tatouer sur un grain de beauté. Je les ai fait retirer tout simplement pour être plus facilement tatouable, c’est une question de confort. Et je ne voulais pas avoir des petits points marron sur mon tatouage. C’est pour la même raison d’esthétisme que je me suis fait retirer les tétons et le nombril (je m’étais déjà fait tatouer dans le nombril) : je voulais être plus lisse.

Avez-vous déjà fait des réactions allergiques ?

Avant de me faire tatouer, j’avais fait des tests dermatologiques à l’hôpital Saint-Louis, parce que j’avais découvert une allergie de contact aux sels de chrome, développée à cause de gants de musculation de mauvaise qualité, le fameux «cuir tanné aux sels de chrome». Je voulais donc savoir s’il n’y avait pas de sels de chrome dans les encres. On m’avait dit qu’il pouvait y avoir des traces dans les encres vertes. Donc, pendant un moment, j’ai évité les encres vertes, et le tatoueur créait du vert en mélangeant du bleu et du jaune. Je n’ai jamais développé, au final, de réaction allergique. En revanche, j’ai eu des cicatrisations plus douloureuses que d’autres, notamment pour tout ce qui concerne les modifications corporelles qui cicatrisent très difficilement. Tout comme l’encre blanche : il faut piquer plus profondément. En général, cette couleur fait des croûtes douloureuses et met plus de temps à cicatriser. Les seules réactions que j’ai pu avoir sont liées aux frottements. Quand je remonte les manches d’une chemise, ça va frotter, frotter, frotter et les grosses lignes du tatouage vont ressortir et vont gratter. Cela peut se produire au pli des bras et au niveau du col aussi.

Avez-vous des regrets ?

Je ne regrette aucun de mes tatouages puisque de toute façon j’évolue en permanence… et je continue à me faire tatouer couche sur couche. C’est le fil rouge de ma vie. Je ne me suis jamais fait tatouer non plus sur un coup de tête. J’ai tous mes rendez-vous pris jusqu’à juillet 2025. J’ai mon tatoueur, il me connaît, je le connais, j’aime son travail… C’est d’ailleurs ce que je conseille aux gens en général : choisissez un tatoueur et son travail, plutôt que d’aller à la première boutique au coin de la rue avec une photocopie d’un dessin. Si vous choisissez un tatoueur et son univers, il s’amusera, car vous lui laissez carte blanche et vous, vous aimerez forcément le résultat, puisque vous aimez déjà son travail. Alors qu’avec la photo et une idée trop précise, vous risquez d’être déçu et le tatoueur va prendre la commande comme un travail alimentaire et non pas comme un choix artistique…

Je ne regrette donc aucune séance que j’ai pu faire. Je regrette plutôt de ne pas avoir tenu assez longtemps. J’ai dû écourter certaines séances, car j’étais fatigué… Par exemple, actuellement, avec mon tatoueur, on fait des retouches sur la plante de mes pieds. On les noircit. On fait un quart d’heure par mois à peu près, car c’est extrêmement douloureux. En plus la cicatrisation est horrible, avec des croûtes, comme des cailloux dans les chaussures… c’est une catastrophe. L’avant-dernière séance, je n’ai pas pu tenir plus de cinq minutes. Et là, oui, je m’en suis voulu jusqu’à la séance d’après… C’est un peu le paradoxe du tatouage : à chaque fois, on attend la séance avec impatience, et une fois qu’on y est, on se dit «mais qu’est-ce que je fais là ?» Et, quand on a terminé, on est content… ou pas, si on n’a pas tenu le choc. Je focusse donc sur mon attitude par rapport aux séances : j’aurais dû dormir plus, mieux manger avant, même si je fais super attention à mon hygiène de vie. Je ne bois pas, je ne fume pas, je fais des heures de sport par jour afin d’entretenir mon corps pour ma deuxième activité, comme je suis aussi mannequin et comédien.

C’est d’ailleurs ce que je conseille aux gens quand ils sollicitent mon avis : ayez une hygiène de vie irréprochable. Si vous fumez, si vous buvez, si vous mangez n’importe quoi, si vous vous couchez tard, forcément la séance va moins bien se passer que si vous êtes un athlète. C’est une question de logique.

D’ailleurs, mes conseils pour le jour J : il ne faut pas avoir bu la veille, il faut avoir beaucoup dormi, il faut avoir bien mangé… Ce sont des conseils de bon sens qui marchent avec tout finalement.

Mais au final, je ne regrette aucune séance parce que de toute façon, je continuerai toute ma vie à me faire tatouer. Donc… même s’il y a quelque chose «d’un peu raté» (je mets bien entre guillemets), de toute façon je le recouvrirai ensuite.

Quels sont vos conseils pour une bonne cicatrisation ?

Premier conseil : on écoute son tatoueur. Moi, comme j’ai commencé en Angleterre, les tatoueurs me disaient «mets de la crème grasse utilisée pour les fesses des bébés, cinq fois par jour, pendant une semaine».

À l’époque, j’étais à l’école, en costume-cravate, donc j’allais aux toilettes (pour personnes handicapées), je retirais le costume et je me mettais de la crème partout, puis remettais le costume. Comme le soin était hyper gras, j’en avais partout, j’ai perdu quelques chemises comme ça d’ailleurs ! Donc, petit à petit, de cinq jours, je suis passé à quatre jours et demi, puis à trois jours… J’ai alors croisé une connaissance qui m’a dit «tu sais que moi, je ne mets rien». Et là, tout a changé pour moi. Comme je passe mon temps à me faire tatouer, ma vie est une cicatrisation permanente, je me suis dit que mettre de la crème tout le temps, ça allait compliquer le truc. Maintenant je ne mets plus rien : je rentre chez moi, je prends une douche, j’essaye de laisser le plus longtemps à l’air libre et je ne mets rien. Je ne mets même pas de pansement à la fin de la séance. Je me rhabille directement par-dessus. La seule différence que j’ai pu constater, c’est qu’au lieu d’avoir trois minutes de retouche je vais en avoir cinq. Mais pour moi, ce système marche. Et en plus, c’est tellement moins d’embêtements au quotidien, de ne pas avoir à mettre de crème, etc. Moi je ne mets rien, c’est ce qu’on appelle la cicatrisation à sec, mais le vrai nom, c’est la cicatrisation de flemmard ! Ce point rejoint ce qu’on disait tout à l’heure sur l’importance de l’hygiène de vie (sport, alimentation, sommeil) et sur le fait de se laver correctement, tout simplement. Au final, le tatouage reste une plaie classique et la cicatrisation fait partie du jeu !

Arrivez-vous à concilier vos tatouages et votre premier métier de professeur ?

Cela fait quinze ans que je suis professeur des écoles (fonctionnaire de catégorie A), j’ai actuellement en charge une classe de CM2. Pendant dix ans, j’ai eu un poste fixe (en comptant les deux ans à Londres, où j’étais au Dulwich College). Ensuite, quand j’ai commencé ma carrière artistique (travail dans les boîtes de nuit, tournages, vidéos YouTube, conventions de tatouage, etc.), j’ai demandé à passer ZIL (zone d’intervention limitée) afin de ne pas avoir de classe attitrée. Je faisais alors des remplacements entre une demi-journée et trois semaines… Cela me permettait d’intercaler ma deuxième activité entre mes remplacements. Or, depuis la COVID, et avec le déficit de professeurs que l’on connaît, il n’y a plus de remplacements courts disponibles, mais plutôt des remplacements longs… Maintenant, je n’ai quasiment que des classes à l’année. Si j’ai de nouveau la possibilité de faire des remplacements plus courts, cela correspondra mieux à ma double vie : la vie artistique et la vie de prof.

Comment êtes-vous reçu quand vous arrivez dans une école ?

J’ai l’habitude de dire qu’il faut «deux minutes pour mes élèves, deux jours pour les parents et deux semaines pour les grands-parents pour m’accepter». Je n’ai jamais eu aucune remarque des enfants sur mon apparence. Ils sont plutôt contents d’avoir un prof qui passe à la télé ou sur Internet. À cet âge-là, les enfants font beaucoup de dessins et ils nous en offrent des pelletées entières. Pour être honnête, je conserve ceux qui me représentent avec mes tatouages. J’apprécie l’effort fait de regarder le modèle sur Internet et de reproduire les motifs !

Est-ce que votre singularité sert les enfants ?

J’ai toujours fait mes tatouages pour moi, jamais pour les autres. Le tatouage c’est comme une histoire d’amour : quand on est amoureux de quelqu’un, on y pense matin midi et soir, on a envie, on en est sûr… Donc je n’ai jamais fait de tatouages pour développer la tolérance, mais il se trouve que j’ai eu de nombreux retours dans ce sens, «ça leur apprend qu’il ne faut pas juger sur l’apparence», «ça leur apprend qu’il faut accepter tout le monde»… Si je peux apporter ma modeste pierre à l’édifice de la tolérance humaine, eh bien, très volontiers ! En parallèle, lors des conventions, je rencontre beaucoup de gens qui sont très fiers que je sois prof, car cela les a aidés à se faire tatouer eux-mêmes alors qu’ils sont policiers, infirmiers, commerciaux… Je sais que j’ai inspiré énormément de gens et tant mieux, même si ce n’était pas le but recherché ! C’est donc très chouette de voir qu’un peu grâce à moi il y a plein de gens qui ont dépassé leurs propres limites et qui profitent de la seule vie qu’ils ont. C’est un peu le carpe diem, ou le you only live once (yolo) des Anglais…

Entre Sylvain Helaine et FreakyHoody, vous ne faites qu’un ?

Non justement, c’est ce qui est intéressant : j’ai ces deux vies-là qui s’équilibrent. D’un côté, Sylvain Helaine, professeur des écoles, et de l’autre, FreakyHoody qui est l’artiste super connu, qui fait des tournages et qui bosse avec de grandes stars… Quand je fais des conventions de tatouage, quand je suis en tournage ou dans les boîtes de nuit, je suis adulé, je suis la tête d’affiche, les gens viennent me voir, il y en a qui pleurent, d’autres qui me font signer des autographes, j’ai des méga fans… ça pourrait éventuellement me faire prendre la grosse tête ! Mais, le lundi matin, je suis à la photocopieuse à l’école et hop, j’ai de nouveau les pieds sur terre. Et quand je pourrais éventuellement me lasser du travail de fonctionnaire arrive le week-end avec les conventions, les affiches dans toute la ville et les gens qui vont venir pour moi. Les deux vies s’équilibrent parfaitement. Et il se trouve que j’ai aussi ces deux personnalités : dans la vraie vie, je suis casanier, je n’aime pas trop parler aux gens, je suis un peu asocial, mais dans ma vie d’artiste, c’est tout l’inverse… il faut vraiment que je sois super sympa, très ouvert. Mes deux facettes se complètent très bien. C’est un peu une dichotomie, Dr Jekyll et Mr Hyde, mais c’est parfaitement complémentaire au final!

Quels conseils donner aux plus jeunes qui veulent se faire tatouer ?

Le tatouage, c’est encore une fois une dichotomie. Dans le sens où chacun fait ce qu’il veut de son corps. Mais en même temps, il faut aussi penser à sa vie, comment la gagner, comment subvenir à ses besoins… Moi j’ai commencé à 27 ans et demi, j’avais un «vrai» métier et je n’étais pas prêt avant… Il y a aussi une affaire de légitimité (entre guillemets évidemment). Quand j’ai fait mon visage, j’étais «légitime» parce que j’avais fait tout le reste du corps avant. Quand je vois des gamins de 18 ans qui arrivent et qui se font direct un tatouage dans le cou ou sur les mains je ne peux pas m’empêcher de me taper la tête contre un mur, même si, encore une fois, ils font ce qu’ils veulent. S’ils ont envie, très bien, mais après, il ne faudra pas se plaindre s’ils ne trouvent pas de travail ou s’ils ont un problème d’interaction sociale… Donc mon meilleur conseil reste : attendez, réfléchissez bien et ne commencez pas par une partie «incachable» de votre corps. On ne commence pas par la main, par le cou, par le visage; on commence par l’omoplate, la fesse, la cuisse, car tant qu’il n’y a pas un CDI ou un poste de fonctionnaire, c’est encore compliqué dans notre société.

Quelle est la question qu’on vous pose le plus ?

Je vais avoir des milliers d’interactions par week-end lors des conventions de tatouage et effectivement il va y avoir trois ou quatre questions qui vont revenir en boucle. La première question reste toujours « Ahhh, vos yeux sont tatoués aussi ? », suivie par « Quelle a été la zone la plus douloureuse à tatouer ? ». Et quand je dis « Je suis à 560 heures pour l’instant… », les gens disent « Pour l’instant ? » et là je dois expliquer de nouveau toute mon histoire…